La guerre des devoirs…

Tel que prévu, la rencontre des parents des enfants du deuxième cycle fut très tumultueuse! Les partisans des devoirs s’opposent à la décision des enseignants et de la direction de ne pas donner de devoirs cette année.
Il faut cependant nuancer, les enfants n’auront plus à faire de «drill» à la maison. On demande à la place aux parents de concentrer leurs efforts sur la lecture…
Durant cette assemblée, le nerveux directeur tente, tant bien que mal, d’expliquer la situation aux parents. La tension présente dans la salle est perceptible. La réceptivité de l’audience est à moitié nulle et notre pauvre directeur patauge pour expliquer le bien fondé de cette décision.
Je crois cependant que cette démarche est bonne, appuyée par une étude de la situation de l’école et sur des recherches sérieuses en éducation.

Grosso modo, ce que notre bon directeur essaie d’expliquer est que:

  • Les élèves de l’école réussissent aussi bien qu’ailleurs. Cependant, à peu près 25% de nos élèves sont considérés comme à risque (échelon 3). Il faut diminuer ce nombre.
  • L’étude de la situation de l’école met en évidence certains points à travailler: la lecture et la collaboration école-famille en sont deux très importants.
  • Les études laissent entendre qu’au primaire les devoirs n’ont que peu, sinon pas d’influence sur la réussite scolaire.
  • On pense aussi à la famille 2006: souvent les deux parents travaillent, il y a de nombreuses familles monoparentales, les enfants passent beaucoup de temps en milieu scolaire (service de garde, de 7h00 à 17h00…) le temps où les devoirs se font n’est pas le plus propice aux apprentissages.
  • De plus, il semble que la lecture soit souvent ce qui est fait en dernier ou négligée dans les devoirs.
  • etc.

L’équipe-école décide donc de transformer les travaux à la maison en les axant sur la lecture… holala!

De nombreux parents sont contre cette décision et veulent que le conseil d’établissement s’y oppose. Certains claquent la porte! D’autres sont bien contents: le temps des devoirs étant un temps de conflit plutôt qu’un temps de qualité en famille! Des parents ont peur que leurs enfants ne soient pas prêts pour le secondaire. D’autres voient le gain de temps pour faire autre chose et faire vivre des succès extra-scolaires à leurs enfants…

Le guerre des devoirs débute et est loin d’être terminée! Plusieurs parents laissent entendre qu’ils vont faire pression sur le conseil d’établissement, qu’ils iront aux assemblées jusqu’à ce que cette «aberration de non-sens, venu de l’enfer» disparaisse! Ma blonde siège sur le conseil d’établissement, à suivre…

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9 Commentaires

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  1. Personnellement, j’ai jamais cru aux devoirs. Mes trois filles ont passé dans le système, et les devoirs, bof, c’était juste plate.

    Pour les parents qui croient aux devoirs, la solution est simple : qu’ils se donnent, avec leurs enfants une demi-heure de lecture (peu importe laquelle – mais surtout pas des lectures scolaires/plates) par soir. Je suis persuadé que les « notes » de leurs enfants vont monter en flèche en quelques mois. Il faut lire, lire et lire… la solution aux échecs des enfants est là.

  2. Je suis franchement impressionné de voir qu’une équipe-école fasse consensus pour ne pas donner de devoirs. Chapeau ! Ça prend bien des Beaucerons !

    J’espère seulement que vous ne vous laisserez pas intimider par quelques parents qui élèvent la voix, persuadés qu’il faut presser les enfants comme des citrons et que les devoirs sont essentiels à l’apprentissage. Au cas où cela vous aurait échappé, vous trouverez ici plusieurs arguments que j’ai glanés pour étayer votre position.

    Vous avez misé dans le mille en substituant la lecture aux devoirs. Gilles a tout à fait raison, et c’est également ce que recommandent plusieurs experts de l’éducation. Donner le goût de la lecture, c’est probablement le plus magnifique cadeau que l’on peut faire à un apprenant. Le reste viendra de lui-même, et plus encore.

    • Luc Papineau sur 29 septembre 2006 à 1 h 16 min

    M. Roy, bien le bonsoir!

    Premièrement, je pense parfois que les gens ne font pas la distinction entre devoir de type «exercisation» et devoir de «type travail de recherche», par exemple. Certains devoirs demandent aussi de la réflexion poussée et invitent au défi. Je pense entre autres à des activités d’apprentissage (quel doux euphémisme!) reliées à de la lecture ou encore à la création de phrases reliées à des procédés littéraires. Chaque année, quand je donne en devoir (oups!) à mes élèves de m’écrire des figures de style sur un thème donné, c’est un succès flamboyant. Ils le font à l’ordinateur, y incorporent des illustrations et j’en passe! Quand on parle de devoir, il conviendrait d’abord de préciser la chose avant de la condamner.

    Deuxièmement, je trouve désolant de voir répéter ici et ailleurs le vieux cliché usé et éculé à l’effet que la lecture scolaire soit plate. Ce sont les enseignants de français qui choisissent les romans que vont lire les élèves, dans les limites que leur imposent souvent les écoles. Émettre un tel jugement manque de nuance et les condamne en bloc comme s’ils étaient des connards qui manquaient de goût ou des incultes n’ayant aucune idée des préférences des enfants. Ce n’est pas parce que je n’aimais pas les mathématiques au secondaire que cette matière est plate ou insignifiante, par exemple.

    Enfin, en 14 ans d’enseignement du français, j’ai été à même de constater que la lecture intensive n’a pas les vertus magiques qu’on lui prête. Il est vrai qu’elle augmente le vocabulaire des enfants et peut, dans certains cas, les aider dans la construction de leurs phrases. Cependant, à court et à moyen terme, elle a un impact négligeable sur l’orthographe et la grammaire. Si un enfant lit écrit sans fautes, c’est tout d’abord parce qu’il accorde de l’importance à la maîtrise de sa langue tant en lecture qu’en écriture. Si un enfant veut mieux écrire, il doit tout d’abord mieux connaître la nature des matériaux qu’il emploie (classe et rôle des mots ou groupes de mots) et être amené à développer des stratégies de rédaction et de correction efficace. Ces deux aspects que je mets de l’avant dans mes classes (et croyez bien que je déteste l’analyse logique et grammaticale) ont un impact plus rapide et durable chez les jeunes. Pensez que la solution aux échecs des enfants est dans la lecture et que les résultats de ceux-ci monteront en flèche une fois qu’ils liront est un mythe rousseauiste et dépassé.

    • Aurélie sur 29 septembre 2006 à 12 h 17 min

    Bonjour, je suis étudiante au CÉGEP et je dois dire que je suis de l’avis que la lecture aiderait beaucoup les jeunes à bien écrire. J’ai été bénévole pour SOS français, j’ai essayé d’aider des adolescents qui ont des difficultés avec la syntaxe, l’orthographe, l’écriture en général et vous savez quoi? Presque tous ceux qui nécéssitaient le programme ne lisaient jamais, n’y trouvant pas l’ombre d’un plaisir, évitant une telle corvée minutieusement. Comme pédagogues, vous avez du voir des fautes et des erreurs syntaxiques aussi monumentales que celles auquelles j’ai du faire face, qui me laissaient perplexe. J’ai bien tenté de les faire lire, de leur suggérer des petits romans accrocheurs mais, à 18-19 ans, leur idée était faite, renforcée par toutes ces années de scolarité qui avait fini par les dégoûter de la langue française, surchargée de règles compliquées et arbitraires, dénuée de sens, si étrangère pour eux. Il n’était tout simplement pas dans leur culture de lire car leurs seules expériences dans ce sens se résument depuis leur plus tendre enfance à lire des extraits de textes choisis et à faire des éxercices de grammaire. Dans cette situation, je me serais vite détournée de cette langue que je trouve si riche, moi aussi.
    J’ai personnellement toujours été une bonne lectrice, j’adore lire, j’ai été élevée dans un milieu où la lecture était favorisée, prisée. Je ne saurais donner un rôle à chaque mot dans une phrase, différencier une préposition d’un article, et pourtant je n’ai jamais eu de problême en français, au contraire. Je crois que c’est à force de voir des constructions de phrase correctes, de lire des mots bien écrits que le cerveau se conditionne à reconnaitre une faute. C’est mon cas et je doute de l’isolement de ma situation.

  3. Comme ma réponse est un peu longue, j’ai préféré en faire un billet. C’est là :
    http://www.gilles-jobin.org/jobineries/index.php?2006/09/29/469-la-lecture-et-les-devoirs

    • Luc Papineau sur 30 septembre 2006 à 23 h 22 min

    Bonsoir,

    Sans méchanceté, j’ai cessé de compter les fautes du billet d’Aurélie (qui porte le même prénom que la fille de M. Jobin) après neuf… et trois d’entre elles ne s’expliquent pas par des erreurs de frappe puisqu’il s’agit d’erreurs de syntaxe. Dans la majorité des cas, par ailleurs, il ne s’agit pas d’un manquement à une règle d’accord complexe, mais d’orthographe d’usage ou grammatical simple. On est loin des règles «compliquées et arbitraires». Tout cela me fait donc douter des bienfaits de la lecture. Quand le texte écrit contredit le discours de la sorte, il y a manifestement un problème. Mais trêve de badinages.

    La langue française et l’enseignement de celle-ci semblent avoir le dos bien large quand vient le temps de chercher un coupable pour la piètre qualité du français des élèves québécois. Et les «gérants d’estrades» ne manquent jamais pour faire part de leurs commentaires, comme si le fait de parler une langue faisait automatiquement d’eux des spécialistes ou des experts qui manquent cependant d’humilité et du sens des nuances. Je ne prétends pas à l’un de ces titres mais, avec 14 années d’enseignement de cette langue, je crois avoir un bagage de réflexions et d’observations peut-être plus pertinent.

    Par rapport au billet d’Aurélie et pour revenir à notre propos principal, je répète cet argument évoqué plus haut: est-ce si étonnant que quelqu’un qui ne porte pas attention à la qualité de la langue qu’il emploie à l’écrit (donc, qui fait des fautes et qui s’en moque) ne soit pas intéressé par la lecture? Le raisonnement d’Aurélie est boiteux: ce n’est pas parce qu’il ne lit pas qu’un élève fait des fautes, mais bien parce qu’il n’aime pas le français tant écrit que lu. Croire aux vertus de la lecture de la sorte et sans aucune nuance est un mythe. une croyance, une conviction erronée.

    Enfin, pour en revenir au propos central de cet échange, le problème fondamental des devoirs, ce n’est pas leur forme, c’est leur pertinence et la motivation à les faire. Et ces deux variables dépendent de l’enseignant qui les donne.

  4. Sans méchanceté, on reconnaît bien là l’attitude de certains enseignants dont la première réaction est de sortir la calculatrice pour compter les fautes.

    Mais pour en revenir au propos de ce billet, je crois que le triplet (parent-enfant-lecture) est gagnant et rapporte de bénéfices à court et à moyen terme. C’est le pendant intellectuel d’une activité comme la marche : au quotidien, 30 minutes de cet exercice amélioreront la santé physique. Imaginez un parent qui donne une heure de son temps à son enfant le soir : d’abord une petite marche de 30 (ou 15) minutes, puis une petite lecture de 30 (ou 15) minutes. Peut-être est-ce une illusion, mais je reste convaincu que l’enfant aurait une bien meilleure réceptivité/participation à l’école. Il ne s’agit pas ici de faire du parent un pédagogue, mais bien de s’allier, dans la mesure de ses moyens, la personne qui a le plus à coeur la santé globale de son jeune.

    Je ne suis pas le seul qui pense ainsi : dans plusieurs projets éducatifs (et dans les plans stratégiques des CS) ne retrouve-t-on pas souvent comme objectif principal l’amélioration de la lecture chez nos enfants? Je sais bien que ce n’est pas une justification scientifique des avantages scolaires de la lecture, une foule ayant parfois tort, mais il n’en demeure pas moins que ma proposition de « devoirs » mérite un essai. Et puis, si certains croient qu’il n’y a aucun bénéfice à moyen terme, tout au moins aura-t-on eu du plaisir à lire (informellement) pendant une partie de notre vie…

    • Luc Papineau sur 1 octobre 2006 à 17 h 51 min

    Comme je l’ai expliqué dans un billet sur le blogue de M. Jobin, je ne crois pas que ce soit la lecture qui est la cause de l’amélioration du français d’un enfant, mais plutôt l’accompagnement que le parent donne à celui-ci lors de cette activité. Cet accompagnement est bénéfique tant sur le plan formel que sur le plan affectif des apprentissages. Le plan, affectif, ai-je écrit: on est loin des blablabla de certains pédagogues.

    Quant aux enseignants à calculatrice, si j’avais voulu être plus précis, j’aurais effectué un calcul de la fréquence d’erreurs. Cela aurait été plus précis et parlant. De plus, je dois vous avouer que je n’aurais pas eu à sortir ma calculatrice dans un tel cas puisque j’appartiens à cette génération qui peut compter dans sa tête. Dans le présent cas, mon propos voulait illustrer que le billet d’Aurélie manquait de cohérence à cause de sa forme. Je peux comprendre la beauté d’un messsage malgré des fautes de français. Je peux difficilement accepter qu’on mette de l’avant certaines formes de pédagogie en les disant efficaces alors que, dans les faits, la réalité des mots écrit nous invite à penser le contraire.

    Cela étant dit, M. Jobin et moi nous rejoignons bien plus qu’on serait tentés de le croire: un «devoir», pour être efficace, doit être significatif et les parents ont un rôle évident à jouer dans l’accompagnement de leur enfant. Ces deux facteurs sont souvent, hélas, peu importants aux yeux de bien des gens au Québec.

    • Marie sur 7 octobre 2006 à 18 h 39 min

    M. Papineau écrit :  » ‘Sans méchanceté’, j’ai cessé de compter les fautes du billet… »

    Sur le plan de la logique argumentative, discréditer la personne pour tenter d’affaiblir l’apport de celle-ci constitue un sophisme .

    Sur le plan émotif, l’attaque personnelle et publique a été cinglante et j’ai été témoin de ses effets blessants.

    Sur le plan de mes convictions personnelles concernant l’amour de la langue, je crois qu’on devrait s’abstenir de se servir du « bon » français pour humilier.

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